En sortant du bureau de mon oncle, je tentai de rester impassible mais ce fut en vain. J’étais beaucoup trop excité pour être calme : il venait de m’annoncer qu’il m’avait recommandé pour une enquête dans la Ceinture Noire. À propos d’un ogre à plusieurs bras qui y sèmerait le chaos. C’était de loin le travail le plus excitant que l’on m’avait confié depuis que j’avais rejoint le Clan Shinnin ! Il n’y avait qu’une seule ombre au tableau, j’allais devoir faire équipe avec un membre du Clan Kodama. Ils avaient été missionnés pour l’analyse d’échantillon sanguin, et l’un des représentant allait enquêter avec moi. Enfin, c’était plutôt moi qui allais l’accompagner vu qu’ils avaient été engagé avant et que mon oncle voulait que je le surveille par la même occasion. Bref, cela ne changeait rien au fait que c’était très excitant !

Cependant, je ne connaissais pas très bien la Ceinture Noire. J’avais toujours habité une des ruelles du Safran et mes parents n’avaient jamais voulu que j’explore ces quartiers défavorisés. Bien entendu, je leur avais désobéi de temps en temps, comme n’importe quel enfant, mais je ne m’étais jamais avancé très loin dans la banlieue. Heureusement, le rendez-vous qui m’avait été fixé se trouvait en périphérie de la zone, devant une porcherie. Littéralement. Enfin, devant ce qu’il en restait car la façade avait visiblement été détruite récemment et raffistolée à la hâte avec des planches.

Il ne me restait donc qu’à attendre mon compère. Dans l’excitation de la mission, j’avais marché plus rapidement que prévu et j’étais arrivé beaucoup trop sur les lieux. Ce n’était de la faute du Kodama, mais j’espérais qu’il n’allait pas tarder non plus. Je commençai alors à tourner en rond dans la rue à peine fréquentée à cette heure-ci du matin. Par expérience, je savais qu’elle ne tarderait pas à se remplir de monde et il serait donc plus difficile de se retrouver. Surtout que je ne savais pas qui était mon co-équipier.

Je ne dus pas attendre très longtemps, tout au plus quelques minutes, avant que quelqu’un vienne se présenter à moi. Il était plus âgé que moi, de quelques années au maximum, possédait de longs cheveux roux ainsi qu’un bandeau sur l’œil droit. Je n’eus pas le temps d’ouvrir la bouche qu’il se présentait déjà et me donnait une réponse à la question que je lui aurais posé tôt ou tard. C’était donc le membre du Clan Kodama avec qui j’allais enquêter sur cette affaire…

C’est bien moi en effet, répondis-je en prenant la main qui m’était tendue tout en acquiesçant de la tête. Maintenant que nous sommes tous les deux-là, je propose que nous commencions l’enquête, Ameyūri-san.

Étrangement, le ton de ma voix n’était en adéquation avec ce que je pensais. Alors que j’étais complètement excité à propos de la mission, le son de ma voix ne laissait transparaitre qu’une étrange lassitude pour quelqu’un de mon âge. D’habitude, mon corps reflétait exactement ma façon de penser, mais en présence d’un membre du Clan Kodama, j’avais l’impression de me renfermer. Comme si mes émotions se bloquaient à l’intérieur de mon cerveau et qu’il ne voulait plus partager. C’était très étrange comme sensation. Dans tous les cas, j’ouvris la marche et entrai dans le bâtiment.

Immédiatement, je fus assailli par des odeurs d’excréments, de boue et d’animal. Quelques larmes perlèrent au coin de mon œil et il me fallut plusieurs secondes pour m’y habituer. Il faut dire que les enclos étaient juste à notre droite et il fallait tous les longer pour atteindre la partie habitable du bâtiment. Il ne me fallut que très peu de temps pour l’atteindre tant j’avais pressé le pas à cause de l’odeur insoutenable. Toutefois, je remarquai qu’il n’y avait presque pas de porcs dans les différents enclos et ceux qui restaient semblaient blessés pour certains.

Je frappai alors à la porte et entendis presqu’immédiatement une voix bourrue et calme nous prier d’entrer. Ce que je fis sans hésitation. Cela donnait sur une seule et unique pièce qui ne contenait que le strict minimum pour la survie. L’homme était sur notre droite. Je m’inclinai.

Enchanté, je m’appelle Aoki Katataka. Nous nous excusons de vous déranger si tôt le matin, mais nous avons été mandatés par les Clans pour enquêter sur une série de troubles causés par un « ogre à plusieurs bras ». Nous aurions quelques questions à vous poser à ce sujet si vous êtes d’accord.

J’espérais juste qu’il allait accepter de parler.

Tandis que nous nous installions dans le domicile de l’éleveur, Ameyūri posa sa première question avant que je n’aie l’occasion d’ouvrir la bouche. De toute façon, j’aurais certainement posé la même et j’attendis donc avec attention sa réponse.

C’est bien aimable à vous de vous inquiétez d’un petit éleveur de porcs comme moi, en tout cas. Mais, j’en ai entendu parler. J’en ai même été victime ! Un jour, il a déboulé comme un fou, à détruit ma façade et a tué la majorité de mes animaux. C’est catastrophique car sans eux, je n’ai plus de revenu et je ne sais pas comment je vais faire. Au fait, je ne me suis pas présenté, je m’appelle Saito Hideharu.

C’était donc bien ce qu’il me semblait : les planches mises à la hâte sur la façade, c’était pour cacher la destruction causée par l’ogre. Toutefois, nous avions besoin de plus d’informations pour continuer notre enquête.

Je suis vraiment désolé pour ce qui vous est arrivé, je vous promets qu’on fera tout pour arrêter le coupable. Mais pour ça, nous avons besoin de plus d’informations… Est-ce que vous avez-vu son visage, ou a-t-il dit quelque chose ?

À part des grognements, il n’a pas dit grand-chose… Par contre, je suis sûr d’une chose : il avait une grande balafre du côté gauche de son visage. Mais c’est tout ce que je saurais vous dire. J’ai eu la plus grande frayeur de ma vie, je dois bien vous avouer que je suis resté caché jusqu’à ce qu’il s’en aille… Par contre, vous pouvez examiner comme bon vous semble les porcheries.

J’allais justement y venir haha, dis-je en me tournant vers mon collègue, je ne sais pas si tu as d’autres questions ?

De mon côté, j’avais fini et je ne voyais pas trop quelle autre question je pouvais poser. Mais Ameyūri avait peut-être d’autres idées. Et puis, je n’avais pas envie d’ennuyer ce pauvre homme trop longtemps. Il avait déjà assez de soucis ainsi…

Ameyūri parla à son tour et remercia le pauvre éleveur tout en lui tendant quelques pièces. Cela n’allait pas compenser ses pertes, mais au moins cela pourrait l’aider. Il faut dire qu’il ne lui restait plus beaucoup de cochons qu’il devrait certainement garder s’il voulait qu’ils se reproduisent pour continuer son élevage. Toutefois, je me demandais sincèrement comment il allait faire pour survivre jusqu’à ce qu’il puisse vendre des porcs à nouveau. Rien que d’y penser, j’eus de la peine pour lui… Conclusion : Nous devions arrêter le criminel avant qu’il ne fasse plus de dégâts.

Je fus alors tiré hors de mes pensées par mon collègue qui me demandait d’aller inspecter la façade extérieure tandis qu’il posait quelques questions. Je hochai alors la tête avant de me lever. C’était un travail d’équipe, alors autant se partager les tâches.

Je vous remercie de nous avoir accordé du temps, et je vous promets que nous arrêterons ce criminel. Aurevoir, Saito-san.

Sur ce, je me dirigeai vers la porte et pris une grande inspiration discrètement pour retenir mon souffle. Cette fois-ci, j’étais préparé et je ne laisserai pas avoir par l’odeur qui régnait dans les porcheries. Je sortis alors de l’habitation et refermai la porte délicatement derrière moi. Une fois que ce fut fait, je me dirigeai d’un pas pressé vers l’extérieur afin de l’examiner. Peut-être trouverai-je d’autres indices…

Une fois dehors, je dû plisser les yeux à cause du Soleil qui était monté rapidement, mais je luis fis dos rapidement pour observer la façade. À première vue, il s’agissait simplement d’un mur qui avait été rafistolé à la hâte avec des planches en bois. Mais il y avait très certainement un indice qui s’y cachait. Je me rapprochai pour mieux l’observer. On voyait très bien qu’il avait été détruit par la force brut, et c’était très impressionnant, mais surtout la puissance avait été concentrée en un point. Les bâtiments à côté n’avaient pas subi le moindre dégât. Cela signifiait donc que l’auteur maîtrise assez bien son pouvoir. Il devait donc être un membre d’un Clan, ou en avoir fait partie, un athlète ou tout autre personne ayant une bonne maîtrise. Cette déduction permettait déjà d’éliminer la majorité des gens originaires de la Ceinture Noire, mais c’était encore de trop. Nous devions trouver d’autres indices…

Je décidai donc d’inspecter le mur de plus près, et je me rapprochai donc de celui-ci. Mon nez se trouvait maintenant à quelques centimètres à peine des briques et des planches. Je devais être minutieux si je ne voulais rien rater. Le moindre indice pouvait nous être utile… Toutefois, je ne trouvai rien du tout. Pas le moindre indice qui puisse nous donner une nouvelle piste à suivre ou un suspect potentiel. Ce fut Ameyūri-san qui me sorti de mes pensées.

Malheureusement, je n’ai rien trouvé de concret mais à la vue des dégâts subis par la façade, j’en ai déduit que la personne contrôlait assez bien sa force, et donc son pouvoir. Tu as peut-être eu plus d’informations que moi ?

Tout en l’écoutant parler, je sortis l’ordre de mission que m’avait remis mon oncle et le parcouru rapidement des yeux.

Dans tous les cas, il y a une autre victime de cet « ogre à quatre bras » qui habite à quelques rues d’ici. Peut-être qu’elle en saura plus que Saito-san…

Selon moi, il était plus prudent de nous rendre chez une autre victime du criminel car nous n’avions pas réellement de piste à suivre malgré les informations données par l’éleveur. Et suivre ma déduction sans aucune autre preuve à l’appuie était tout aussi dangereux. Autant que je le sache, il pourrait très bien s’agir d’un Athlète très connu ou d’un anonyme de la Ceinture Noire qui maîtrisait bien son Pouvoir. Rien ne nous permettait d’aller dans un sens ou un autre.

Je décidai donc d’attendre les directives d’Ameyūri-san avant de me diriger vers la seconde victime, qui était une éleveuse de poulet cette fois-ci. Peut-être qu’il voulait rendre visite à une autre victime qui était listée sur notre ordre de mission. En attendant, je m’appuyai légèrement sur les planches qui servaient de façade.

Ameyūri-san semblait totalement d’accord, il valait mieux qu’on aille interroger l’éleveur de poulet qui n’habitaient qu’à quelques rues d’ici. Nous partîmes donc en direction de la seconde victime. Tandis que nous marchions, les rues se remplissaient peu à peu avec le Soleil qui s’élevait dans le ciel. Le bourdonnement d’une ville qui s’active commençait à se faire entendre, et bientôt les rues allaient être noires de monde. Ce n’était plus qu’une question de minutes.

Après plusieurs tournants, nous arrivâmes enfin à destination. Étrangement, le poulailler, ou du moins l’extérieur, semblait en bon état. L’avant du bâtiment n’avait pas pris le moindre dégât… Cela signifiait que l’éleveur connaissait le coupable, ou du moins l’avait fait rentrer sans savoir qu’il était « l’ogre à quatre bras ». Je tournai alors la tête vers le Kodama et sans attendre de confirmation de sa part, j’entrai dans le bâtiment. Ce fut presqu’un choc quand je vis l’intérieur tant il contrastait avec la façade. Tous les poulaillers avaient été détruits, aucun ne tenait encore debout et je n’étais même pas sûr que des poules avaient survécu à l’attaque. En tout cas, je n’en voyais aucune… Une chose était, cet éleveur était dans une situation bien plus délicate que Saito-san.

La disposition des lieux était semblable à celle de la porcherie sauf qu’ici, l’habitation se trouvait un peu plus sur notre droite après être entré. Nous nous dirigeâmes directement vers cette seconde porte et frappai. Une voix de femme se fit rapidement entendre, juste avant que la porte ne s’ouvre.

Bonjour messieurs, que puis-je pour vous ? demanda-t-elle poliment.

Je l’observai quelques secondes avant de répondre. Elle avait l’air plutôt stressée et elle n’avait clairement pas dormi depuis plusieurs nuits. Ce qui était compréhensible au vu de la situation dans laquelle elle se trouvait.

Bonjour, nous sommes envoyés par les Clans Shinnin et Kodama pour enquêter sur cet ogre à quatre bras qui ravage les différents élevages du quartier.  Du coup, est-ce que ce sera possible de vous poser quelques questions ? J’oubliais, je m’appelle Aoki Katataka et voici mon collègue Ameyūri Tengen.

Oui, bien sûr ! Entrez, je vais aller vous chercher mon mari. C’est qui était présent lors de… l’incident.

Nous nous entrâmes alors dans l’habitation et restèrent dans l’entrée jusqu’à ce que l’homme n’arrive et ne nous désigne où nous s’installer. Nous nous assîmes alors sur le coussin et face à lui. Je fus le premier à prendre la parole.

Tout d’abord, je tiens à m’excuser à propos de ce qui se passe. Vous n’avez pas à souffrir des affres d’un monstre pareil ! Ensuite, j’aimerais vous poser quelques questions… J’ai vu que votre façade n’avait rien, donc je suppose que vous avez rencontré notre « homme » avant qu’il ne devienne un monstre à quatre bras ?

Il n’y a pas de soucis, ce n’est pas de votre faute si un monstre se ballade dans la Ceinture Noire. Ce n’est pas le premier et ce ne sera certainement pas le dernier. Toutefois, vous avez raison. J’ai bien vu le coupable… Mais il portait un masque qui couvrait la moitié de son visage. Je n’ai pu voir que la grande cicatrice sur le côté gauche de son visage ainsi que ces yeux. Un bleu et un vert. Même s’il faisait déjà sombre, j’ai bien pu voir qu’il n’était pas de la même couleur

Vous voulez dire qu’il avait des yeux vairons ?

L’homme acquiesça. Cela faisait un signe distinctif de plus qui nous permettrait de le reconnaitre, mais cela ne nous donnait pas de piste pour autant. Juste un portrait tout au plus.

Et si ce n’est pas trop indiscret, vous savez me dire pourquoi il était là ? Il voulait faire affaire avec vous ?

Exactement, il était venu pour m’acheter quelques poules ! J’étais content car ça se vend plus cher que des œufs et il ne me faut pas longtemps pour les remplacer. Ça grandit vite une poule vous savez ! Toutefois, tandis que nous discutions du prix, il n’arrêtait pas de fixer les animaux et au bout d’un moment, il a craqué. Ce n’était pas beau à voir… Et je me suis caché avec ma femme directement, je n’aurais pas voulu qu’il lui arrive quoique ce soit

Et il ne vous a pas donné de nom je suppose ?

Du tout… Par contre, je pense qu’il ne vient pas de la Ceinture Noire parce qu’il m’a avouer errer pendant un certain temps dans les rues avant de trouver un vendeur de poules. Pourtant, ce n’est pas ce qui manque dans le coin ! Surtout quand on sait où chercher… J’allais oublier ! Avant qu’il ne pète un plomb, il n’avait pas l’air tout à fait normal. Comme s’il avait bu, pris de la drogue ou quelque chose comme ça…

Ce fut alors à mon tour d’acquiescer et je me tournai en même temps vers collègue. Peut-être avait-il plus de questions…

Je fus plutôt surpris par la question posée par Ameyūri-san. Il lui restait donc bien une question à poser à l’éleveur, mais jamais je n’aurais pu la deviner. Ou même y penser par moi-même. Je ne sais pas si j’avais manqué des indices qu’il aurait repérés, mais c’était bien joué de sa part. Nous savions maintenant que nous n’étions pas les seuls à enquêter sur cette affaire, un autre groupe cherchait à découvrir la vérité. Sauf que nous ne savions rien de leurs intentions, elles étaient peut-être mauvaises… Surtout que pour débarquer en plein milieu de la nuit, soit ils n’avaient pas beaucoup de considération pour les victimes, soit ils étaient pressés.

Tandis que le Kodama tendait quelques pièces comme lors de notre précédente visite, je m’inclinai pour remercier nos hôtes de nous avoir reçu. Nous sortîmes sans plus tarder du bâtiment.

Bien joué ! Maintenant, on sait qu’on n’est pas les seuls sur cette enquête ! Mais… Euh… Comment tu as deviné que d’autres personnes étaient venues leur poser des questions ?

Tout en discutant, nous nous enfoncions dans la Ceinture Noire. Aller interroger d’autres éleveurs en périphérie ne nous aurait pas beaucoup avancer. Comme l’avait suggéré mon coéquipier, il valait mieux prendre la direction du centre du Quartier. C’était là que nous risquions de trouver le plus d’informations…

Toutefois, marcher tranquillement devenait de plus en plus difficiles dans les rues étroites de la Ceinture. Elles se noircissaient rapidement de monde au fur et à mesure que le Soleil s’élevait dans le ciel. Rapidement, je fus à peine capable de discerner mon collègue et il fut difficile pour nous de rester l’un près de l’autre. Je fis tout de même de mon mieux.

Soudain, un homme apparut un peu plus loin devant nous et nous interpela. Malgré la foule, je compris rapidement que c’était à nous qu’il voulait parler. Nous nous écartâmes donc au maximum de la foule.

Vous êtes bien des envoyés par les Clans, n’est-ce pas ? Voyant son air inquiet, j’hochai la tête et il reprit, Parfait, parce que j’aurais besoin de votre aide si vous le voulez bien… C’est à propos d’un homme étrange, qui a l’air plutôt saoul, qui trouble l’ordre publique. Et détruit des biens qui ne sont pas à lui !

J’hésitai quelques secondes, jetai un coup d’œil à Ameyūri-san, et me décidai à la suivre. S’il n’en avait pas envie, il n’était pas obligé de venir avec moi mais moi, je ne changerais pas d’avis. Calmer un simple homme ayant un peu trop abusé de la bouteille ne devrait pas être trop compliqué…

Alors que je m’apprêtais à suivre, Ameyūri-san me retint par le coude et composa un mudra de sa main libre. Il voulait enregistrer ma signature chakratique afin de me retrouver plus facilement en cas de problème. Je n’avais qu’à malaxer mon chakra pour qu’il sache instantanément où j’étais. Plutôt pratique comme technique ! Quand il eut fini, je le saluai de la tête et m’éloignai avec le badaud qui avait besoin de notre aide.

Nous passâmes par des petites ruelles qui étaient très peu fréquentées, principalement à cause de leur exigüité. Heureusement que mon guide semblait bien connaitre les lieux. Il n’hésitait pas une seule seconde quand il s’agissait de tourner à gauche ou à droite. Une idée germa alors dans mon esprit.

Excusez-moi, mais je pourrais vous poser une petite question ?

Euh… Oui, bien sûr… Mais… euh… Je ne sais pas si je vous serai d’une grande aide…

Ce n’est pas grave, toute aide est la bienvenue ! Est-ce que, par hasard, vous auriez entendu parler d’un « ogre à quatre bras » ?

Il parait qu’il cause pas mal de dégâts dans le quartier, déclara-t-il après plusieurs secondes, enfin c’est ce que j’ai entendu…

Pas très utile donc comme réponse… Toutefois, un petit signe dans son comportement m’indiqua quelque chose de beaucoup plus important. Au moment de devoir tourner à gauche ou à droite lors du virage suivant, il sembla hésiter. Il ne s’arrêta qu’une fraction de seconde, et hocha presqu’imperceptiblement la tête, avant de prendre la rue de gauche. Jusqu’à présent, il n’avait pas hésité une seule fois. Cela ne pouvait signifier qu’une chose : ma question l’avait perturbé. Toutefois, je ne savais pas si c’était parce qu’il avait peur du criminel ou si c’était parce qu’il avait un lien avec. Je n’avais pas assez d’informations pour ça…

Nous y voilà ! C’est lui qu’il faudrait calmer.

Il parla calmement et pointa du doigt un homme. Il était plutôt grand et avait une assez forte carrure. Il devait faire pratiquement deux fois mon poids… Cependant, je voyais bien que ses mouvements n’étaient pas très ordonnés et il manquait de perdre l’équilibre à chacun de ses pas. Au cas où je n’arrivais pas à le raisonner, un coup bien placé devrait suffire à le refroidir.

Je pénétrai donc sur la petite place où tous les passants s’étaient réfugiés le long des façades, tandis que l’homme ivre délirait tout seul en son centre. Je m’approchai de lui.

Monsieur ! Pourriez-vous vous calmer, s’il-vous-plait ? En plus de déranger les habitants, vous détruisez leurs biens. Arrêtez tout de suite, ou je devrai user de la violence.

J’avais légèrement haussé le ton sur la fin de ma phrase, mais ma voix était restée totalement calme. Cela ne servait à rien de s’énerver… Pour l’instant. L’homme se rapprocha alors de moi, toujours aussi maladroitement, et se campa comme il put.

C’est à moi que tu parles moucheron ? J’ai pas bien entendu, c’est à moi que demande de me calmer ? Minus ! Tu vas voir si je vais me…

La différence de poids était assez évidente entre nous deux, mais la vitesse ou la force l’était moins. Au premier abord, personne n’aurait parié sur moi. Alors qu’il parlait pour ne rien dire, à par m’insulter, mon pied partit si vite qu’il ne vit rien venir. Sans le moindre coup de semonce supplémentaire, mon corps bascula en arrière tandis que ma jambe droite monta en piquet et à toute vitesse. Mon pied entra alors en contact avec son plexus solaire et je sentis immédiatement son souffle se couper. Il tomba sur le sol comme une pierre, sans conscience. Il n’avait pas à m’appeler minus.



Que quelqu’un prévienne la milice qu’on vienne le chercher. Il devrait rester à terre un moment, mais s’il se réveille ici, il risque de foutre encore plus la pagaille.

Mon travail étant fait, d’une manière plus brutale que je ne l’avais espéré, je me tournai vers la rue d’où je venais pour en avertir l’homme qui m’avait conduit jusqu’ici. Toutefois, ce fut avec surprise que je constatai qu’il n’était plus là. Il avait complètement disparu et il n’y avait plus aucune trace de sa présence… Tant pis, ce n’était pas très important. Ce n’était pas ma mission au départ. Je malaxai donc un peu de mon chakra pour prévenir Ameyūri-san que j’avais fini. Je n’avais aucune idée d’où il s’était rendu et il faudrait donc que ce soit lui qui me retrouve…

Tandis que je continuais à malaxer mon chakra, je me dirigeai vers les abords de la place. Comme je devais attendre mon compagnon, autant rentabiliser ce temps perdu et enquêter dans les environs. Je m’approchai donc d’une vieille dame qui balayait devant chez elle. Elle n’avait pas l’air d’avoir été dérangée plus que ça par l’ivrogne, et elle continuait sa vie sans y avoir prêté attention.

Ce n’est pas la première fois qu’il se donne en spectacle, n’est-ce pas ?

Oooh loin de la mon garçon. Au moins deux ou trois fois par semaine, je dirais. Mais depuis le temps, j’ai arrêté de compter…

Et vous savez pourquoi ?

Pas la moindre. Tout ce que je sais, c’est qu’il répète sans cesse que l’Ogre va tous nous tuer…

Du coin de l’œil, j’aperçu le Kodama s’approcher de la place. Il était déjà temps de terminer cette courte enquête qui m’avait au moins appris que notre cible commençait à être célèbre dans les environs et que l’ivrogne savait peut-être quelque chose.

… Mais je n’en sais pas plus à son sujet.

Ce n’est pas grave, vous m’avez déjà bien aidé. Merci et au revoir.

Je m’inclinai rapidement et sans un mot de plus, je m’éloignai. La discussion avait été courte, mais utile en un sens. De son côté, la vieille femme recommença à balayer devant chez elle comme si de rien n'était. Comme si notre discussion n'avait jamais eu lieu. Je m’approchai donc du centre de la petite place ainsi que de l’ivrogne qui gisait toujours au sol, inconscient et attaché.

Boh… C’était juste un homme bourré, rien de bien compliqué. Par contre, le garçon qui m’a conduit ici a totalement disparu… dis-je en jetant plusieurs coups d’œil aux alentours. Bref, tu as trouvé quelque chose de ton côté ? Je viens d’apprendre que l’ivrogne sait peut-être quelque chose à propos de notre homme. Tu crois que ça vaut la peine de l’interroger ?

D’un côté, il avait peut-être des informations utiles à propos de celui qu’on recherchait. Peut-être qu’il le connaissait où l’avait vu de près. Il y avait même des chances pour qu’il sache quel était son but vu qu’il avait l’air d’avoir peur de lui. D’un autre côté, il l’avait peut-être simplement vu une fois à l’action sans être sobre et son esprit avait fabulé à propos de ce qu’il avait vu. Toutefois, avant qu’on ne prenne une décision, j’écoutai ce que Ameyūri-san avait à dire. Peut-être que cela nous aiderait.

La traque de cet « Ogre » à quatre, six, ou dix bras – selon les versions des ivrognes et ignorants des bas quatiers – prit une tournure particulière lorsque les deux mercenaires remontèrent enfin sur la piste de leur proie. Malgré l'hostilité flagrante des autochtones de la Ceinture Noire, ce fut avec stupeur que les élus des clans Tsukuri et Kodama tombèrent sur le cadavre froid du suspect. Abandonné dans une ruelle, le corps avachi sur une caisse miteuse, il n'avait plus rien de monstrueux. De nombreuses entailles, et plaies plus profondes, parsemaient son épiderme en charpie. Mais ce fut cette abondance de sang quasi noir, poisseux, qui impressionnait le plus sur cette toile à ciel ouvert. Ça avait été un massacre. On avait brisé ce pauvre « Ogre ». On l'avait haï au point de violenter sa chair déjà tiède. Les enquêteurs ne disposaient d'aucun indice sur les responsables de ce meurtre, mais les rumeurs sur la participation du Yoaketsume dans cette chasse à l'homme en disaient déjà bien assez.