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    Message par Le Conteur Ven 21 Fév - 19:50


    Lieu : ... au-delà des frontières dangereuses de Kusa no Kuni ...
    Date : ... au cours de l'an 2 ...

    Le cœur du garçon tambourinait contre sa poitrine. Son souffle haletant bouleversait son organisme enivré par l'adrénaline. Il courrait. Courrait pour sa survie. Courrait pour son bien. Zigzaguant entre innombrables crevasses du canyon, l'aventurier bondit de relief en relief, écorchant la roche en y apposant ses paumes. Devant lui, un bouc musela son instinct de survie pour singer sa course, fuyant la petite bouille de chair humaine à ses trousses ; mais celle-ci ne faisait que raccourcir la distance les séparant. À chaque faille, chaque obstacle sur la route, le gamin rognait de quelques centimètres de plus, un sourire béat affublant son visage, la bouche crispée par l'effort, l'émail de ses dents dévoilée au grand jour. Un torrent d'hormones envahissait son corps pour lui permettre de se surpasser.

    « Tu perds de la vitesse, Haramaki ! »

    L'animal ne pouvait pas se permettre de répondre – mais cela n’en occultait pas la sombre vérité. Les mouvements de l'humain étaient bien plus rapides, et enchaînés avec aisance. Le bouc, quant à lui, peinait à mettre ne serait-ce qu'un sabot devant l'autre. Ce n'était plus qu'une question de temps avant qu'il ne s'écroule, ne tombe dans l'un des pièges naturels du canyon, ou ne se fasse rattraper par son destin. Ce qui arriva bien plus vite que prévu.

    Dans un saut improbable, le garçon plaqua son compagnon sur le côté, manquant de lui arracher un bout de corne par la proximité dangereuse avec un roc. L'animal essaya de se débattre, certes ; mais les frêles muscles du gamin dominèrent leur proie vulnérable sans le moindre problème.

    « Je t'avais dit que je te surpassais au saut de cabri ! ... Comment, ça c'est de la triche ? Eh ! J'ai quatre pattes, tout comme toi. ... Tu es si mauvais joueur, crétin de bouc. Oui, un mau-vais joueur-euh, c'est bien ce que j'ai dit ! ... Ah ouais ? Tu veux régler ça maintenant ? ... Eh, te défile pas ! ... Comment ça, « ça n'en vaut pas la peine » ? ... Mais je ne suis pas fatigué, moi ! ... »

    Le gamin s'assit en tailleur à côté de son ami, les joues rougies par l'effort, son torse brûlant dansant au gré de sa respiration. La bête peina à se remettre en place, les genoux ployant sous la fatigue.

    « Tu n'es pas drôle. »

    L'humain décala sa maigre besace pour la placer devant lui, et commença à la trifouiller pour y chercher de l'or, ou, vraisemblablement, de quoi se sustenter. En guise de collation, il extirpa deux pommes de son fourre-tout, et en offrit une cadeau à son meilleur ami. La seconde lui était réservée.

    « C'est beau, pas vrai ? »

    Perchés sur la cime du canyon, l'entière péninsule se dévoilait à la curiosité de deux aventuriers de l'extrême. Des montagnes à perte de vue ; des cours d'eau serpentant dans les vallons des pics omniprésents ; des masses noires sombres perdues dans le ciel, à l'horizon. L'un de ces décors particuliers que l'imagination du garçon adorait se mettre sous la dent pour broder des rêves de mille et une couleurs.

    « Je me demande où est-ce qu'il est. ... Moui, ça, je m'en doute. ... Oui, tu as raison, on pourrait leur demander. ... Hahaha, peut-être des aspics cachés derrière des rochers ? ... Vraiment ? Et tu parles le poisson, toi ? ... C'est bien ce que je pensais. ... Eh, ce n'est pas du jeu ! C'est toujours à moi de faire les présentations. ... Tu te sous-estimes. Je suis sûr que c'est juste de la timidité. »
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    Message par Le Conteur Ven 21 Fév - 20:50


    Lieu : ... au-delà des frontières dangereuses de Kusa no Kuni ...
    Date : ... au cours de l'an 2 ...

    Bête et enfant suivirent le cours du ruisseau pour rejoindre l’ombre des pics. Bien loin des crevasses de tantôt, ils se baladèrent le pas assuré, l’un à califourchon sur l’autre, bêlant et déblatérant sur les mystères de la vie tandis que, progressivement, ils arrivaient à destination. Le garçon s’était mis en tête l’idée d’atteindre une source d’eau potable afin d’y poser leur campement pour la nuit – si possible dans un endroit couvert pour pallier les caprices du ciel.

    Lui se fichait bien de l’état de sa couche, ou de la colère du firmament. Il adorait dormir à la belle étoile, l’échine épousant la branche épaisse d’un arbre séculaire, tandis que la faune sauvage grouillait tout autour de lui. Mais il s’inquiétait davantage pour l’état de son fidèle compagnon, et implacable monture, l’accompagnant aux quatre coins de « Hametsu no Tairiku » depuis tant de lunes déjà. Ensemble, ils avaient résisté aux pires sécheresses de l’océan de sable, et conquis le libre-arbitre de la plus noble race du monde en ruine. Et maintenant...

    « Tu vois ça, Haramaki ? ... Oui, ce qui est droit devant. C'était... euh... rhétorique. Je crois que c'est le bon mot. ... Quoi qu’il en soit, ça ferait la cachette parfaite pour s’y abriter ! »

    Le ruisseau les avait conduit dans une sorte d'étang au courant perpétuel. Afin de vider le trop-plein d'eau, un barrage naturel marquait la différence entre la retenue d'eau et des rapides écumeuses, empêchant le bassin de croupir. Et, découverte admirable : une cavité avait été creusée dans la roche pour accueillir jusqu'à trois hommes.

    Ou un bélier éreinté par sa journée.

    « Ça ira pour aujourd'hui ! Notre course m'a é-pui-sé. ... Ah, toi aussi ? … Oui, j’ai eu peur aussi à ce moment-là, j’ai cru que j’allais devoir te ramener vers moi. … Tu dis que tu n'aimes pas ça, mais tu n'es jamais conscient ! ... Tu es toujours ronchon, d’un sens. … Gngngn. ... Eh, attends un peu, soiffard. »

    L’aventurier quitta la toison de son ami et s’en alla dégourdir ses jambes. Tandis que le bélier pesta dans son coin – une habitude que le gamin refusait toujours de tolérer –, son compagnon se dirigea vers la retenue d’eau. Il plia ses genoux à hauteur de roche pour laper l’eau, le dos plié comme un linge essoré ; avant d’autoriser sa bête à enfin pouvoir se sustenter. Haramaki sauta sur la permission pour avaler des litres et des litres d’eau.

    « Ne vas pas vider l’étang ! … Et on ne parle pas la bouche pleine, gros bêta. »

    Le gamin se redressa, et marcha en direction de l’eau. En plein milieu du bassin, il s’accroupit alors en tailleur, la surface de l’eau retenant son poids plume. Les mains jointes en un signe étrange, ses doigts se torturant pour copier l’apparence d’une gueule animale, il offrit son esprit à la berceuse de l’inconscience, pataugeant dans une mer de spiritualité, le souffle régulier de la méditation en figure de proue. Autour de lui, tout s’effondra. Il n’y avait ni roche, ni eau ; mais un assemblage abstrait de lignes écarlates, entrelacées pour composer d’obscures trames. Haramaki n’était plus ; à la place, une pelote de fils éthérés l’avait remplacé sur un fond plus opaque que les plus noires des abysses. Son âme vagabonde percevait son propre corps inanimé, brillant de mille cordes à l’épaisseur extravagante. Mais cette vision habituelle n’était pas la raison de sa transe. Ce voyage, ce périple, cette épopée, tendait vers une destination existentielle. Par-delà les vestiges, l’enfant et la bête cherchaient l’un des leurs.

    Des remous apparurent soudain autour du gamin. Pourtant, ni son bélier incapable de boire la moindre goutte d’eau supplémentaire, ni un quelconque tremblement de terre de faible ampleur perturbant l’accalmie du lieu, ne justifiait ces vibrations. Ou alors, l’épicentre avait dû apparaître loin des deux aventuriers. Très loin.
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    Message par Le Conteur Lun 24 Fév - 17:09


    Lieu : ... dans les profondeurs des Mille Crocs ...
    Date : ... au cours de l'an 2 ...

    « Ne bouge pas, Haramaki. Je me dépêche ! … Non, tu ne vas pas te balader. Hors de question. … Mais tu vas encore te perdre ! Tu le sais ! … Bon. Reste sage, d’accord ? S'il-te-plaît. »

    * * *

    La roche s’effrita sous les doigts du gamin. Une main dressée devant lui, il se frayait un chemin dans les entrailles même de la terre pour s’enfoncer dans des strates encore inconnues de l’œil humain. Malgré les ténèbres de la galerie, l’astre solaire ayant abandonné l’idée d’éclairer le chemin de l’aventurier dès le premier virage, celui-ci semblait savoir où il se dirigeait. Un instinct, ou plutôt, une présence, lui tenait la main pour aller de l’avant.

    Mètre après mètre, virage après virage, l’enfant ressentit la température chuter en flèche, tandis qu’il perçait tantôt dans une galerie naturelle, et découvrait ensuite la poche d’une nappe phréatique évitée de justesse. Pourtant, il continua. Aveugle, guidé par les seuls fils écarlates de son sixième sens mis en exergue, il descendait de plus en plus profondément dans le manteau des Mille Crocs. Jusqu'à rencontrer un obstacle majeur sur son chemin.

    Si aucune roche n’avait pu résister à l’érosion causée par l’aventurier, le matériau dressé devant lui semblait au-delà de sa portée. Un mur d’obsidienne, terriblement épais, terriblement solide, invulnérable aux tours de passe-passe de la jeune taupe. Lorsque l’enfant posa une main curieuse sur l’étrange veine, un sentiment particulier percuta son être. Un coup de jus extraordinaire ; une pulsation aigüe parcourant son corps des doigts à la tête. Selon toute vraisemblance, la chose qui lui faisait face n’avait rien de commune. Du moins, pour les autres.

    « C’est… c’est… c’est… toi… c’est… toi… c’est… toi… toi… toi ? »

    Sa voix s’envola dans un écho infini, dans une myriade de projections. La présence ne put lui répondre de vive voix ; mais un message avait définitivement atteint la conscience du jeune homme.

    « Continuer... tinuer... tinuer... nuer... ? Tu en es vraiment sûr... -ment sûr... -ment sûr... sûr ? »

    La vision lancina l’innocence de l’aventurier. Il devait faire couler le sang. Mais comment ? Comment pouvait-il se résoudre à commettre pareilles affres ? Face à l’effroi, l’enfant recula d’un pas. Pourtant, la voix n’abandonna pas sa requête et continua d'ébrécher l’humanité de l’explorateur, tentative après tentative. Ça n’était plus un choix, mais un devoir. Ça n’était plus hors de question, mais probable. Ça n’était plus meurtrier, mais salvateur.

    Alors, il se résout à agir.

    Des ténèbres de la galerie émergea une lumière aveuglante. Sa main tendue recueillait toute la puissance de l’éclair, aux gazouillis suraigus et entêtants. Son corps était devenu une arme. Un pouvoir absolu passait au travers de ses veines. Et ce fut sans broncher, ni éprouver le moindre remord, qu’il abattit violemment sa lame sur la paroi.

    La gerbe de sang se cristallisa aussitôt. Mais, après avoir écarté les deux moitiés organiques, l’enfant dut se rendre à l’évidence : un chemin vers son but existentiel avait bel et bien été ouvert.
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    Message par Le Conteur Dim 1 Mar - 0:01


    Lieu : ... dans le royaume de l'insensé ...
    Date : ... au cours de l'an 2 ...

    Le jeune aventurier déambulait sur un sol mou. Même s’il n’y avait toujours pas de lumière – son artifice foudroyant ayant disparu aussi vite qu’il était arrivé – cette impression terrifiante ne le quittait pas d’une semelle. Ce tunnel, ces galeries, n’étaient pas normales. Et la chaleur envahissante, semblable à l’intérieur d’un four, confirmait l'étrangeté de ce biome unique. Les murs suintaient. Le plafond ruisselait. Le sol dégorgeait. Ce relent de fer, omniprésent, condamnait à jamais la bienveillante ignorance que le garçon s'infligeait de bon gré.

    Il l'avait trouvé.

    Perdu dans les entrailles d'entrailles, le garçon resta immobile un moment avant de décider de la suite. Jamais il n'avait connu pareille situation, les deux mains plongées dans la sueur et le sang. Sa quête héroïque, initiatique, s'était brisée sur un récif dangereux nommé réalité. Était-ce le seul moyen pour atteindre son pupille ? Si la voix l'avait guidé depuis la lointaine surface jusqu'aux strates les plus sombres du continent, il était possible que oui.

    « J'ai peur... »

    Le timbre du garçon vibrait de vérité. Le tissu de ses atours absorbait l'hémoglobine environnante comme une éponge asséchée. Tétanisé, pris au piège dans cette toile gore de mauvais goût, la faune locale commençait à sentir sa détresser pour venir lui arracher son étincelle de vie. La faune, oui. Des silhouettes difformes, asymétriques, monstrueuses, se détachant des murs pour gagner une conscience propre. Des agglomérats de chair et d'os, de sang et de tissu, de muscle et de mucus. Le garçon les sentit aussitôt. Comment ne pas percevoir ces démons ? Leurs intentions étaient mauvaises. Hargneuses. Viscérales. Leurs actions semblaient motivées par un instinct primitif, dont le rôle-clé était de protéger l'Hôte des envahisseurs. Et l'aventurier en avait le profil parfait.

    « Qui êtes-vous... ? »

    Le gamin leva sa main. Une flamme arbora le creux de sa paume pour éclairer les environs. Et devant lui, cinq drôles de tanuki l'observaient, aux pattes antérieures et à la queue extrêmement longues, tous recouverts, ou composés – redouta l'aventurier dans un éclair de pensée – d'une étrange masse de sable gorgé de sang..

    « S'il-vous-plait, allez-vous-en. ... Comment ? Des ennemis ? ... Mais ils sont... ... D'accord. ... Ce sont des parasites. Je dois m'en occuper. ... Les annihiler. N'en laisser aucune petite miette... »

    Le flambeau s'étouffa aussitôt.

    « Je suis vraiment désolé pour ce qui va arriver. »

    Le gamin gonfla ses poumons à en faire exploser ses bronches. Et, lorsqu'il recracha ce trop-plein d'air saturé en chakra instable, son souffle se transforma en une gigantesque boule de feu pour calciner les fantômes organiques.

    * * *

    Le jeune garçon abandonna le parterre de cendres derrière lui. Des statues étranges tenaient encore debout parmi le chaos infernal, au nombre de cinq, le teint noir charbon. Un tremblement soudain donna l'impulsion nécessaire pour éradiquer l'une d'entre elles, s'effondrant en un tas de poussière parsemé de minuscules rubis. Un tremblement – ou la convulsion de douleur d’une entité ayant encaissé un assaut interne d’envergure.

    « Continuer... Encore... Toujours plus loin. ... À droite ? ... Faire attention à cette... porte. ... Atteindre le bon moment pour la franchir. ... Une valve. La tienne. Je... ... Oui, je vais y arriver. Tu peux me faire confiance. Jamais je ne t'abandonnerais. ... Parce que nous sommes frères. »

    Au crépuscule d'une éternité pénible de marche, une lueur attira enfin l'attention du gamin. Un halo violet, éthéré, intrinsèquement chakratique. L'odeur de cette magie le rappelait ses propres artifices. Un ressenti antique. Une nostalgie dépourvue de souvenir. Une fibre froide mais familière. Il était arrivé.

    « Je... C'est... »

    Un immense cadenas trônait au-dessus de lui, auquel étaient accrochées des chaînes tout aussi vastes. Chaque anneau surpassait par dix fois la taille du garçon ; et l'entière infrastructure s'évanouissait dans la chair de l'entité pour dissimuler une partie quasi infinie de l'iceberg. L'aventurier avait atteint le Cœur. Alors, il ouvrit le sien.
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    Message par Le Conteur Jeu 26 Mar - 20:00


    Un cataclysme s'abattit sur les Mille Crocs. Un séisme dantesque fracassant les pics séculaires dressés vers les cieux. Secousses après secousses, les fissures traversèrent tout le pays, fragilisant les structures du relief, élargissant les crevasses de cet biome en ruines à en y voir ses profondes artères. Le berceau de la Foudre avait été blessé. Des rivières d'eau remontèrent à la surface, éjectées depuis de lointaines nappes phréatiques soumises à une pression monstrueuse. De gigantesques blocs de roche se détachèrent du manteau terrestre, se dressant telles les écailles d'une créature d'une taille inconcevable. Le firmament cria de douleur ; un puissant éclair frappa l'extrémité de la plus haute dent des Milles Crocs. Le déferlement d'énergie, jalousant la violence à laquelle se livrait la terre, annihila l'aiguille rocheuse pour projeter ses vestiges aux quatre coins du pays.

    Le déluge manqua de percuter Haramaki. La bête, affolée, serpentaient entre les larmes du ciel tombant sur son chemin. Ni son abri de fortune pour la nuit, ni le bassin d'eau depuis lequel il s'abreuvait, ne pouvaient se vanter d'encore exister. Dans sa rage, la terre s'était assuré de tout détruire – et faire table rase de son passé.

    Une crevasse se dressa devant la bête. Après avoir escaladé un piédestal de roc d'un saut de cabris, le bélier offrit une confiance aveugle à son instinct de survie pour traverser l'obstacle. Tandis qu'il posa un sabot sur le sol, la faille s'ouvrit de plus bel, manquant de faire basculer l'animal dans les abysses du monde en ruines. Mais ça n'était pas son dernier jour. Il fallait fuir. Galoper à toute jambe. Et surtout, ne pas penser à son maître oublié.

    Un énorme cristal rouge traversa le sol, manquant d'empaler Haramaki. Basculant sur ses pattes arrières, le bélier évita se justesse ; mais un pic fragilisé, non loin de lui, menaçait de l'écraser dans sa chute.

    Un nouvel éclair, à deux pas de la bête, la convainquit de presser le pas. Derrière elle, le monde s’effondrait, tout le pays semblait se retourner sur lui-même, parcelle par parcelle. Chaque secousse paraissait plus forte que les anciennes, d'une cadence crescendo n'ayant l'air de rencontrer aucun joug. Chaque tremblement crevait le sol de nouvelles failles, façonnant un gigantesque labyrinthe à ciel ouvert. Chaque séisme abattait davantage de pics tel un bûcheron fou dans une forêt d'arbres morts, la mâchoire du monde brisant ses Crocs les uns contre les autres dans un tumulte assourdissant. Chaque cataclysme laissait la porte à une myriade de filons écarlates, semblables à celui s'était confronté à la survie du bélier, dont l'éclat baignait la zone d'un charme envoûtant.

    « Haramaki ! »

    Le faciès ensanglanté du gamin s'afficha dans son champ de vision, à sa gauche, crapahutant hors d'une crevasse instable pour rejoindre l'air libre. D'une main tremblante, il hélait sa monture, l'envie de la rejoindre transcendant son extrême fatigue. Son sang brûlait dans ses veines. Ses os, à l'instar des pics de ce pays mis en déroute, subissaient des milliers de fractures. Pourtant, il persévérait. Un pas après l'autre, il se rapprochait de son bélier, de sa monture, de son ami. Il était inconcevable de l'abandonner au chaos. Il était inconcevable de sacrifier sa vie pour la liberté d'un autre. Il était inconcevable de contempler impuissant son trépas. Mais sa rage ne cessait pourtant de gronder. Un pic écarlate manqua d'embrocher le jeune garçon, dont les muscles commençaient étrangement à s'affiner, et les joues, à se creuser. Sa tignasse était devenue hirsute ; des poils étaient nés sur son visage jusqu'alors imberbe. Quand il s'approcha assez près de son bélier, celui-ci faillit ne pas le reconnaître.

    « Saute vers moi, pendant qu'il est encore temps ! »

    Une crevasse notable séparait les deux âmes-liées. Le havre de paix éphémère qu'avait trouvé le bélier commençait à s'effriter. De part et d'autre du cratère, des morceaux de roche se jetaient encore et toujours dans les ténèbres abyssales, les rhizomes de ce réseau infini de fissures s'approchant de la bête pour la croquer en entier. Le temps était compté. Haramaki devait sauter. Alors, il escalada un bout de relief, comme il en avait déjà eu l'occasion ; prit appui dessus pour amorcer sa cabriole ; attendit l'aval de son subconscient avant de parier sa vie aux dés ; puis...

    « Maintenant ! »

    Le bélier se sentit pousser des ailes. C'était le bon moment. Il allait retrouver son maître, son cavalier, son ami, et ensemble, ils allaient fuir ce cauchemar réel. Le temps sembla se ralentir. Dans cette fenêtre d'adrénaline, le jeune homme put voir le visage déformé de sa bête, trahissant sa peur profonde de disparaître. Mais ça allait être bientôt terminé. Ils allaient pouvoir se retrouver. Et, ensemble, ils allaient pouvoir fuir ce cauchemar réel.

    « Haramaki ! Non ! »

    Un ultime tremblement lacéra directement la crevasse que le bélier essayait d'outrepasser. En un clin d’œil, la terre s'effrita par les deux bouts, le vide avalant des mètres de plateforme. Dans un élan de détresse, le jeune homme bondit en avant, écrasant son poids sur le sol instable, friable, la main tendue pour agripper le poids lourd. Il encaissa la retombée de son corps et, dans un équilibre inespéré, lutta avec la froide gravité pour remonter son fidèle compagnon. Mais le dieu endormi n'en avait pas terminé. Il tournait, encore et encore, emmitouflé dans sa couverture chaleureuse, une douleur intense l'ayant aiguillonné en plein cœur. Et la crevasse, elle, devenait gouffre.

    Une étincelle humaine vrilla dans le regard de la bête.

    « Non... Pas toi... »

    Le jeune homme se sentait partir, happé vers les abysses. Il n'avait plus le choix. Sa fatigue le condamnait à un dilemme qu'aucun être ne voudrait subir. Le choix de sombrer dans les bras de son meilleur ami, ou de vivre avec le fardeau de sa perte autour de la cheville. Aucune once d'énergie physique, ni spirituelle n'habitait son corps. C'était encore un miracle qu'il résistait autant à la traction du poids du bélier vers le cœur du monde. Les secondes s'écoulaient trop vite. Tels les grains du sablier du temps, la roche s'effritait davantage, le promontoire sur lequel s'était écrasé le jeune homme allant définitivement rompre. Il n'y avait plus de temps. Il n'y avait plus le choix.

    L'animal bêla. Le maître comprit. Alors, il honora le vœu d'Haramaki.
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