Mettons les choses au clair
Je ne m’étais pas trompé, malgré une certaine ressemblance physique, le jeune homme présent n’était pas celui que je connaissais sous le nom de Ryomen Shiro. Il avait la même couleur de cheveux, mais ce n’était en apparence pas le seul point commun entre les deux.
« Enchanté, Shitamuki Hyozan, de même Tomoe Mirai. Je suis content de vous revoir en ces lieux, Ajitsuke Seido. »
Après avoir écouté attentivement, en silence, le visage neutre, mes trois interlocuteurs, je réfléchis à ce que j’allais bien pouvoir leur répondre. L’ambiance générale était larmoyante, ils étaient sans aucun doute tous infectés par la perte d’un des leurs et la disparation d’un autre. Le chasseur était en apparence le plus infecté des trois, tremblant, larmoyant, déprimé. La jeune femme, quant à elle, jouait un jeu dans l’intérêt des enfants de son Orphelinat, ce que je pouvais comprendre.
« Je peux comprendre que vous doutiez de moi, nous ne nous connaissons pas. Cependant, sachez que pour information, le nouvel Orphelinat Danketsu qui existe depuis quelques semaines déjà au cœur de la vieille ville est de mon fait, j’en suis l’actuel directeur. Nous avons une surface suffisante pour accueillir une centaine de pensionnaires. Nous sommes également autonome grâce à notre potager et à notre poulailler et nos arbres fruitiers. Nous revendons le surplus au marché pour acheter du riz, de la viande ou du poisson. Ma famille est réputée au sein du clan Tsukuri pour avoir parmi les meilleurs chasseurs du clan, ainsi qu’une très grande utilisation des Arts Martiaux et une grande connaissance qui s’est transmise de génération en génération. J’en suis l’héritier et donc je dispose de certains moyens financiers à ma disposition. J’ai suivis un apprentissage très strict, et même si c’est foncièrement différent, j’aime à penser que les enfants de l’Orphelinat Danketsu suivent une certaine rigueur dans leur apprentissage, afin de faire d’eux des adultes responsables, autonomes et avec les compétences et connaissances suffisantes pour avoir un métier qui leur plaira et ils pourront bien gagner leur vie afin de ne plus connaître la misère de la rue. Je sais que ma façon de faire, peut paraître stricte, mais c’est comme ça que j’ai décidé de fonctionner, surtout au vu des nombreux avantages que ces enfants auront accès dans le futur au sein du village et du clan Tsukuri. L’Académie est un projet que j’envisage depuis plusieurs années et commence enfin à se concrétiser. Les enfants auront droit aux meilleurs précepteurs et artistes martiaux. Ils apprendront à comprendre et respecter la nature, à chasser, à écrire, à lire et se renforcer le corps et l’esprit grâce aux entraînements martiaux. Ce seront soit des littéraires, soit des guerriers, soit des chasseurs, soit des artistes martiaux. Le choix leur appartiendra, mais ce sera aux bénéfices du clan Tsukuri, sachez le. C’est pour cela que je n’ai plus besoin d’investissements de particulier vu que le clan est enclin à participer financièrement, en totalité. Cependant, j’ai pour objectif d’atteindre assez d’influence au sein du clan pour pouvoir agir sur l’importance de travailler avec le peuple et les autres clans, ce que le clan se refuse à l’heure actuelle. »
Ils ne me connaissaient pas, après tout, et moi non plus, d’ailleurs. La dernière fois que j’étais venu, nous avions un accord tacite entre Ryomen Shiro et moi-même. Quant à cette journée particulière, je souhaitais m’engager personnellement sur le futur du village et des enfants. Surtout maintenant que le projet de l’Académie commence tout juste à se concrétiser, enfin.
« Je ne demanderai pas que vous me fassiez confiance, ni que vous mettiez vos enfants sous ma charge, je sais aussi bien que vous ce que c’est que de se séparer de ceux que l’on veut protéger et chérir. Sachez juste une chose, vous trois, que si vous pariez sur moi, c’est parier sur un futur meilleur pour les enfants du village. Le choix vous appartient. Dans un premier temps, il est clair que j’en serai leur seul bénéficiaire, ainsi que les enfants. Cependant, dans un futur, plus ou moins proche, je saurais vous rendre la pareille. »
En fin de compte, le choix leur appartenait totalement. Je désirais toutefois rajouter un détail important sur l’Académie et l’Orphelinat. L’intégration, les inscriptions et surtout ce que ça impliquait de me rejoindre.
« Au cas où, j’ai avec moi quelques parchemins d’inscriptions pour l’Académie, que Shitamuki Hyozan pourra, je pense, vous aidez sans problèmes, à les remplir. Bien sûr, il n’y aura aucuns frais, pour eux, en termes de matériel académique et vestimentaire. Quant à mon Orphelinat, sachez que les enfants ont le choix de l’intégrer ou pas, après un temps d’adaptation de quelques jours. Aucun d’entre eux n’est forcé de rester, cependant, une fois ce délai passé et s’ils veulent reste, nous passons un accord entre l’enfant et moi-même comme quoi je suis la personne responsable de son avenir, jusqu’à son indépendance, et ce que cela implique. »
Je sortais de dessous ma veste quelques documents d’inscriptions où je m’engage à prendre soin des enfants lorsqu’ils sont dans l’enceinte de l’Académie et où la personne en charge s’engage à amener l’enfant chaque jour à l’heure et ce, jusqu’à sa sortie de l’Académie. Je les remis à l’hôte des lieux, ainsi que quelques documents d’engagement en tant que fournisseur de denrée alimentaire contre une rémunération et un contrat d’enseignant littéraire. Je regardais les deux autres ensuite afin de leur indiquer certaines dispositions que j’étais prêt à prendre, même s’ils refusaient de rejoindre l’Orphelinat ou pire encore, de rejoindre l’Académie.
« Sachez, Ajitsuke Seido et Tomoe Mirai, que si vous le souhaitez, je peux à ma manière vous aider, en fournissant un matériel de qualité au chasseur et faire en sorte que vous ayez accès à un potager et à des arbres fruitiers facilement. Sans aucune contrepartie, cela va sans dire. Dites vous que c’est un geste de bonne volonté afin d’établir entre nous de bonnes relations. »
J’avais les compétences nécessaires à leur construire personnellement une enceinte qui permettrait de nourrir l’entièreté de son Orphelinat de la Ceinture Noire. C’était une offre en bonne et due forme avec aucune contrepartie, en guise de bonne fois. Je n’étais pas venu pour tenir un long débat et ils auront sûrement des souvenirs plus personnels à partager sur les disparus. Je paraissais sans aucun doute froid à leurs yeux au vu de la situation actuelle, mais je devais me préoccuper en priorité de certaines choses concernant l’Académie. Au fond, je n’avais vu ce Shiro qu’une seule fois et je ne connaissais aucunement ce fameux Hayai. Encore un dernier échange avec eux et j’allais pouvoir quitter les lieux.