Auri sacra fames Contrat personnalisé de rang BOuvrir

L’agitation dans le quartier des épices battait son plein, le moment idéal pour s’éclipser et mener l’enquête ailleurs, tout en laissant quelque chose à se mettre sous la dent à la triade afin de ne pas être dérangés. Remontant en direction des collines nobles, il ne put s’empêcher de regarder le déferlement incessant des sbires du Gardien, il était clair que la ceinture noire allait être bouclée pour la journée, tant que l’affaire n’aura pas été résolue.

Peu importe, au terme de cette petite enquête, nul doute qu’il arrangerait cette situation et dans le cas contraire, alors il se battra pour imposer sa vision des choses. S’il agissait ainsi, c’est qu’il était intrigué plus que tout par le mystère qui se cachait derrière ce fer d’origine inconnu… et plus il croyait avoir percé son secret, plus le flou s’épaississait.

En commençant à creuser, il avait fini par découvrir un réseau ayant une influence jusqu’ici inattendue, pouvoir disperser sa marchandise au quatre coin du village sans qu’aucun clan majeur n’en soit averti était une preuve du pouvoir que pouvait exercer les Shashutsuku… Il lui faudrait creuser la piste plus en détail, pour le moment à par un nom il n’avait rien… mais d’après ce qu’il avait obtenu comme information, la réponse se trouverait sûrement chez les nobles.

En effet, les nobles étaient les archivistes de l’histoire du pays. Perchée au sommet d’une colline, les archives d’Asatsuyu serait certainement son prochain point d’intérêt. Seul ces dernières pourraient lui apporter les réponses qu’il cherchait, sans hésiter, il remonta les rues principales jusqu’à pouvoir mettre une image sur le quartier des arts, les nobles qui le fréquentaient mais surtout, cette attitude qui les caractérisait tant.

À la vue de l’insigne du clan brodé sur son costume, les regards changèrent. Il se vit persécuté par une armée d’yeux, de chuchotements, d’inquiets. Que pouvait bien faire un type tel que lui, ici ? Cette question était la hantise des nobliaux qui ne voyaient en Seijaku, qu’un mauvais présage.

Lui ne s’en préoccupais guère, après tout, il était motivé par bien plus que la simple volonté d’arpenter les rues de marbres du quartier des arts. Non, s’il était là, c’était pour bien plus important. Seijaku avait le sentiment que le dénouement de cette enquête pourrait peser sur l’équilibre du village et que s’il ne prenait pas les devants, nul doute que des gens moins bien intentionnés que lui en profitent pour se remplir les poches.

En revanche, il n’aurait jamais imaginé que ce genre d’affaire puisse attirer un tout autre type de personne.

Cigarette au bec, il se tourna afin de constater. Si les regards étaient autrefois jetés sur lui, c’était sur ce nouvel arrivant qu’ils se portaient désormais. Remontant la ruelle principale, en provenance du Quartier des Epices, un homme à l’apparence sauvage, austère, monopolisait désormais toute l’attention des Nobliaux.

À l’aura qu’il dégageait, il ne faisait aucun doute que le Tsukuri qui s’avançait face à lui créait autant la discorde que Seijaku. Et pour cause, face à lui se tenait.

« Wu Tang… l’Artisan de la guerre. »

Oh, oui, il le reconnaissait. Comment aurait-il pu ne pas le faire ? L’Homme qui se tenait devant Seijaku avait été au cœurs de maintes discussions parmis les bookmakers de la Panacée. Le prétendant aux épreuves, celui qui faisait preuve d’une sauvagerie hors pair, l’ultime guerrier. Un mercenaire qui n’allait pas tarder à faire exploser sa renommée, que ce soit en bien, ou en mal.

Un sourire venait de se greffer sur le visage du Shinnin tandis qu’il s’adossait contre la poutre d’un porche, sur la terrasse d’un café. Comme attiré inexplicablement vers ce dernier, Seijaku se demandait ce que quelqu’un comme lui pouvait bien faire dans le quartier des épices… était-il de mèche avec les trafiquants, peut être, cela justifierai que quelqu’un comme lui aie quoi que ce soit à faire dans le ghetto.

Si le clan Tsukuri était impliqué, alors, toutes ses attentes se verraient surpassées.

Son bâton de cancer s’envolait, avec lui, sa bonne humeur. Quel odieux personnage ce Wu Tang, comme il l’imaginait, son attitude collait parfaitement avec son apparence austère. De toute manière, cette cigarette était en fin de vie, disons qu’il venait de lui éviter de s’en débarrasser lui même. Cependant, l’égo du Shinnin venait de se voir insulter et au vu du regard zahef qu’il venait de lui lancer, nul doute qu’il lui ferait payer tôt ou tard.

Époussetant son costume, Seijaku ne répondit à aucune des provocations du Tsukuri, il n’était pas venu ici pour ça. A vrai dire, s’il était resté là, c’était bien pour prendre la température du quartier et comme il l’avait espéré, sa présence ici faisait tâche, et ça, même Wu Tang semblait l’avoir remarqué.

Il faut dire qu’avec le symbole de son clan à la vue de tous, il pouvait difficilement se fondre dans la masse… et de toute manière, là n’était pas son but. Qu’on le reconnaisse était l’une de ses motivations principales, alors si ça pouvait l’aider à imprimer son nom dans toute les consciences, autant continuer.

Cependant, il n’allait pas le laisser partir sans rien faire, sa provenance l’intriguait et maintenant que les présentations étaient plus ou moins établies, il était temps d’entre dans le vif du sujet. Sa main vint se poser sur l’épaule du barbare, puis, il déclarait : « Wu Tang, c’est ça ? Je suis Seijaku de la ceinture noire… Je penses que tu me dois quelques excuses, n’est-ce pas ? » Bien sur, tout ça n’était destiné qu’à perturber l’égo du sauvage, s’il était tel que les bookmakers le vendaient, nul doute que ces simples paroles suffiraient à le faire réagir. Sa main revint à son emplacement originel, logé au fond de la poche de son chino, s’il se retournerait, il verrait qu’à nouveau ; l’homme de clan avait une cigarette au bec. « Je t’ai vu remonter de la rue principale, puis-je me permettre de demander ce que quelqu’un comme toi faisait dans le quartier des épices ? N’est-il pas qu’un dépotoir à vos bons yeux ? »

Il cherchait à savoir et il n’allait certainement pas le lâcher de sitôt. Seijaku pouvait être assez insistant lorsqu’il le voulait et si la brutalité de Wu Tang était d’ores et déjà avérée, que dire de celui qui venait de faire exploser un bâtiment au nez à la barbe du gardien.

« M’est avis que toi aussi tu as entendu parler de ce petit trafic de fer… Tiens, regarde par là-bas. » Du bout du doigt, il pointait un énième chariot rempli de fer, similaire à ceux aperçus dans la ceinture noire un peu plus tôt. « Je me demandes bien ce qu’il se passe… qui sait, peut être que c’est l’annonce d’un énorme profit… » le Shinnin marqua une légère pause, le temps de tirer une latte sur sa clope. « Ou peut être, une grande guerre… entre les bonnes mains nul doute que l’on pourrait tirer son épingle du jeu. »

Un sourire amical se déposa sur le visage de Seijaku, lui qui d’ordinaire ne se montrait qu’au sein du quartier des épices, quelqu’un comme Wu Tang pourrait lui être d’une forte utilité, ne serait-ce que pour avoir accès à certains endroits réservés au clan Tsukuri.

Après un énième soupir expulsé, le Shinnin arrachait sa main de l’emprise du sauvage Tsukuri, quel grossier personnage. L’expression affichée sur le visage de Seijaku n’était désormais plus parée d’un sourire chaleureux, mais ses sourcils froncés et le regard dédaigneux qu’il lui lançait en disait long sur la suite des évènements. « Décidément, vous, les gens d’en haut vous êtes tous aussi déplaisants les uns que les autres. » Cette pique lancée sèchement marqua fièrement la prise de parole de Seijaku.

« Cesse ton petit jeu avec moi, cette attitude de sauvage n’est bonne qu’à amuser les spectateurs de l’arène. » Sa main se glissa gentiment dans sa poche et n’en ressortit point. « J’ai laissé passé la première fois, cette fois sera la dernière. » Après la fin de sa phrase, le ton de sa voix s’adoucissait, son visage se ravivait et alors qu’il commençait à se frotter le menton, il ajoutait. « De toute manière, tu es probablement trop stupide pour comprendre ce qu’il se joue ici… Décidément, vous, Tsukuri, n’êtes qu’une bande de bons à rien. »

Il se permit de rire dans sa barbe, après tout on le lui avait dit, il ne fait pas bon de pactiser avec ceux de la colline. D’abord, il y avait eu Yuugen, maintenant ce type… voilà de quoi redorer le blason du clan. Un autre soupir s’échappa, et maintenant, Seijaku dégainait son paquet de cigarettes.

« Je m’en vais consommer ce ‘‘Calumet Mortifère’’ un peu plus loin, si tu n’es pas capable de te comporter comme le ferait un homme respectable, alors considères que je me suis trompé de personne… Toutefois, dans l’idée où cette petite affaire t’intéresses, ton aide serait la bienvenue… si tant est que tu soit réellement à la hauteur. »

Il dégaina la main de sa poche, celle-ci tenait en son creux un briquet à silex décoré d’un ornement aux gravures dorés, au coeur de celui-ci l’on pouvait y lire ‘‘神慮 - Shinryo – Volontée Divine’’ . Alors, il alluma une cigarette et lança le briquet à Wu Tang. Et, avant de tourner les talons, il déclara : « Si tu me retournes ce briquet, alors je considérerais qu’on repart sur de bonnes bases… et qu’il n’y aura plus de faux semblants entre nous. »

Puis, enfin, il rebroussa chemin. Laissant l’artisan de la guerre seul avec lui même.

Désormais, il se contenterait d’arpenter les rues bondées du quartier des arts, s’arrêtant de temps à autres dans divers terrasses et échoppes disséminées aux quatre coin de la rue. Certes, sa présence ici pouvait provoquer le coup d’oeil intrusif dès qu’ils apercevaient l’emblème du Clan Shinnin, mais à part ça. Seijaku semblait se fondre dans la masse, n’ayant aucun problème à se mêler à la vie des habitants sur place, qu’il soit accoudé au comptoir d’un stand de nourriture, qu’il soit installé à une table de café, ou bien posé avec les habitants au détour d’une ruelle.

Il attendrait une heure sur place et dans le cas où il ne pointerait pas le bout de son nez… nul doute que Seijaku avait autre chose de prévu.